La vallée de l’Ounila

Le ksar d’Aït Ben Haddou n’est pas posé là par hasard. Il se situe sur le chemin qui reliait jadis le Sud et le Nord, depuis les territoires au-delà du Sahara jusqu’aux grandes cités de Marrakech, de Meknès et de Fès.

Les caravanes chamelières d’alors, parties de l’oasis de M’Hamid El Ghizlane à l’orée du désert, suivaient les sillons tracés par les cours d’eau dans les montagnes pour atteindre après une harassante marche les différents sommets de l’Atlas qui leur permettaient de passer de l’autre côté.

Après la palmeraie de Skoura et son vaste plateau environnant, les expéditions rejoignaient le village de Tikirt depuis lequel commençait la dernière percée au travers les roches sur le fil de l’oued Oulina. C’est sur ses bords que les premiers habitants du ksar trouvèrent naturel de s’installer.

Plus en amont, après la casbah de Tamadkhte où vient se greffer une autre rivière, celle d’Imarene, encore appelée oued Mellah en raison de la présence importante de sel dans ses eaux, après le petit village de Taifest, l’Ounila soudain jaillit des hauteurs de la montagne depuis sa source. Autrefois, les eaux étaient alors abondantes de leur descente effrénée et l’endroit prolifique de verdure attira l’installation de nombreux villages comme Anguelz, Ighourane, Timsal, et surtout Anmiter. C’est là que le peintre Jacques Majorelle aimait à séjourner, dès 1919, et prendre le temps de recueillir sur ses toiles les formes incertaines des casbahs entremêlées à celles des paysages alentour, tant le maillage des couleurs, du minéral au végétal, semblait aller de soi, naturel.

Kasbah de l'Atlas par Jacques Majorelle - 1939
Kasbah de l’Atlas par Jacques Majorelle – 1939

Un autre explorateur, quelques années auparavant, avait décrit l’endroit dans un même élan d’admiration. Après la rudesse du parcours depuis les cols de l’Atlas, alors en provenance de Marrakech, après avoir traversé la plaine aride de Telouet, Charles de Foucauld, en 1883, débouche sur « une vallée qui présente un aspect aussi riant, aussi gai que les solitudes qui la bordent sont mornes et tristes. Au fond, coule un torrent dont les deux rives sont, sans interruption, garnies de jardins et de cultures ; au milieu des figuiers, des oliviers, des noyers, s’élèvent en foule des villages, des groupes de maisons, des kasbahs aux gracieuses tourelles, aux terrasses crénelées, aux balustrades à jour ; maisons aux murailles couvertes de dessins et de moulures ; ksar dont les enceintes, du pied jusqu’au faîte, ne sont qu’arabesques et qu’ornements. Dans ces belles contrées, même la demeure la plus pauvre présente l’aspect du bien-être. Peu de demeures sont blanches : de loin en loin, quelque zaouïa ou les créneaux d’une kasbah ; le reste a la teinte brun-rouge du grès et du pisé. »

Tels sont ses mots dans l’ouvrage de renommé qu’il publiera sous l’intitulé de Reconnaissance au Maroc. C’est le récit d’une vallée où il faut bon vivre, et sans doute depuis les temps les plus anciens puisque les cavernes creusées dans les façades de pierre qui encadrent l’oued laissent deviner une présence troglodyte.

C’est entre ses bras, au bord de l’Ounila qui s’en ira jusque vers le Drâa, et plus au lointain vers l’océan, que le ksar d’Aït Ben Haddou est né, a grandi, et qu’aujourd’hui encore il déploie ses charmes en offrande aux voyageurs à venir.

Ce texte a été rédigé dans le cadre de l’ouverture de la Maison de l’Oralité du ksar d’Aït Ben Haddou.

La série sur le ksar d’Aït Ben Haddou

A visiter : Le ksar d’Aït Ben Haddou

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