Les ruines de Tasgelt dessiné par Charles de Foucault en 1883

Tasgedlt : la mystérieuse citadelle des princesses chrétiennes

Les ruines de Tasgelt dessiné par Charles de Foucault en 1883

À la fin du XIXème siècle, le Sud du Maroc demeure une terre méconnue pour les Européens. Le pays, sous la dynastie alaouite, contrôle partiellement ces régions, souvent administrées par des tribus locales. Charles de Foucauld, déguisé en Juif pour éviter d’attirer l’attention, entreprend cette expédition en 1883, traversant des territoires encore inexplorés par les Occidentaux. Son récit, minutieusement documenté dans un ouvrage intitulé Reconnaissance au Maroc, marque une étape clé dans la connaissance européenne du Maroc profond.

Lors d’un séjour à Tikirt, un douar de la commune d’Aït Zineb (province d’Ouarzazate), il découvre les ruines d’une mystérieuse citadelle dont les habitants racontent d’étranges légendes.

Voici son récit :

« Je profite de mon séjour à Tikirt pour aller visiter les ruines de Tasgedlt, célèbres dans le pays et objet de mille légendes. Elles se composent d’une enceinte presque carrée, jadis garnie de tours. Les murailles, épaisses, ont dû être en maçonnerie à la base, en pisé dans le haut. Il en reste peu de chose. La partie sud est la mieux conservée ; on y voit 7 ou 8 tours ayant encore 4 à 8 mètres. (…) La forteresse, perchée sur une côte rocheuse, se transforme brutalement en muraille verticale où s’ouvrent les bouches de plusieurs cavernes. Une ancienne citadelle, des cavernes, voilà plus qu’il n’en faut aux habitants pour voir ici une trace du passage des Chrétiens. »

Charles de Foucauld – Reconnaissance au Maroc
Croquis réalisé par Charles de Foucault en 1883
Le même site, aujourd’hui …

Une forteresse entre mythe et histoire

Les vestiges de Tasgedlt, bien que partiellement détruits, laissent entrevoir l’ampleur de cette ancienne fortification. Ses murailles épaisses, faites d’un mélange de maçonnerie et de pisé, témoignent d’un savoir-faire architectural adapté au climat aride de la région. L’implantation sur une crête rocheuse offrait un avantage stratégique en cas d’attaque, et les cavernes situées sous la citadelle pouvaient servir de refuges ou de caches pour les vivres.

Les habitants de la région évoquent une légende qui entoure ces ruines :

« Il y a bien des siècles, trois princesses, filles d’un roi chrétien, régnaient sur ces contrées. L’une, Doula Bent Ouâd, résidait dans la forteresse de Tasgedlt ; une autre, Zelfa Bent Ouâd, en habitait une semblable près de l’Asif Marren, à Teççaiout ; la troisième, Stouka Bent Ouâd, vivait à Taskout, sur l’oued Imini. En ces trois lieux, il subsiste encore des ruines similaires. »

Charles de Foucauld – Reconnaissance au Maroc
Les ruines de Tasgelt dessiné par Charles de Foucault en 1883
Croquis réalisé par Charles de Foucault en 1883
Les ruines de Tasgelt, près d'Ouarzazate, aujourd'hui
Le même site, aujourd’hui …

Selon cette tradition orale, les musulmans menèrent de longues guerres contre ces princesses avant de les chasser. Toutefois, Foucauld lui-même émet l’hypothèse que ces forteresses pourraient avoir été construites sous l’ordre d’un sultan marocain, peut-être celui ayant bâti le pont de l’oued Rbat.

Mémoire collective et vestiges d’un passé oublié

Les légendes autour de la citadelle se transmettent de génération en génération. Dans une culture où l’histoire s’écrit avant tout à l’oral, ces récits jouent un rôle fondamental dans la transmission du patrimoine. Les anciens du village racontent encore que des bruits étranges se font entendre la nuit aux abords des ruines, comme si l’esprit des trois princesses continuait de hanter ces lieux. Certains voient dans ces légendes une manière de préserver le souvenir d’un passé lointain, mêlant mythe et réalité.

La forteresse de Tasgedlt n’est pas un cas isolé. Dans tout le Sud marocain, on retrouve des ruines de citadelles ayant servi à la défense des routes commerciales. Des sites comme Tamnougalt ou Tazenakht témoignent de l’organisation de ces territoires, où chaque fortification jouait un rôle de bastion face aux invasions ou aux rivalités tribales.

Aujourd’hui, le douar Tadoula, qui abrite les vestiges de cette ancienne citadelle, pourrait tirer son nom de Doula Bent Ouâd, la princesse qui y aurait résidé autrefois. Si la légende continue de fasciner, le site reste un témoignage architectural et historique du passé mystérieux de la région d’Ouarzazate.

A lire : Il était une fois au Sud Est du Maroc, quatre princesses chrétiennes …

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