Des fouilles archéologiques ont révélé que l’usage des fibules remonte à la préhistoire. Si la version berbère est attestée dès l’âge du bronze au Maghreb, des fibules similaires ont été retrouvées en Égypte ancienne et au Proche-Orient. Ces objets de fixation semblent avoir traversé les époques en évoluant stylistiquement selon les cultures.
Selon Salima Naji, dans Les Cahiers du Musée Berbère, « l’on s’accorde à dire que, visuellement, la fibule représente le féminin dans ses attributs sexués. Chez les Berbères, ce bijou d’apparat est en effet d’abord un marqueur d’appartenance tribale, indicateur de la richesse de la tribu. (…) La paire de fibules est la pièce maîtresse de la dot (lqimt) fournie par le père pour protéger sa fille ».
Elle joue également un rôle rituel. Un rite du Haut Atlas occidental rapporte que lorsqu’une nouvelle génisse était introduite dans une demeure, l’épouse posait une fibule d’argent sur le seuil. L’animal devait l’enjamber en entrant, un geste symbolique destiné à assurer sa fertilité.
Si la fibule berbère possède une forte charge symbolique, sa fonction première reste avant tout pratique. Elle sert d’agrafe pour maintenir les vêtements en place, similaire à une épingle de sûreté. Les femmes berbères l’utilisent de différentes manières : dans les cheveux pour fixer un foulard, en décoration sur le torse, ou par paire sur les épaules pour attacher une pièce de tissu couvrant le dos.
La fibule berbère se décline en plusieurs formes et motifs selon les régions et les tribus. Certaines sont simples, en forme de losange ou de cercle, tandis que d’autres sont richement décorées avec des incrustations de corail, de pierres semi-précieuses et des motifs géométriques. Ces décorations ne sont pas anodines : elles reprennent souvent des symboles de protection, comme l’œil ou des motifs solaires.
Ce bijou ancien apparaît au Maghreb dès l’âge du bronze, témoignant d’un artisanat raffiné et d’une tradition qui perdure à travers les siècles. On retrouve des fibules similaires dans d’autres civilisations antiques, notamment chez les Étrusques, les Grecs et les Romains, soulignant leur usage universel dans le monde méditerranéen.
Aujourd’hui, la fibule berbère reste un élément central dans la bijouterie artisanale du Maghreb. Des artisans perpétuent ce savoir-faire en fabriquant des fibules en argent, souvent associées à des perles colorées ou du corail rouge. Ces bijoux sont prisés tant pour leur valeur traditionnelle que pour leur esthétisme, et connaissent un regain d’intérêt dans le monde de la mode ethnique.
Dans certaines familles berbères, les fibules anciennes se transmettent de mère en fille comme un héritage familial sacré. Elles portent en elles la mémoire de la lignée et conservent parfois une valeur protectrice et symbolique liée à la bénédiction des ancêtres.
Le principe de la fibule n’est pas exclusif aux Berbères. Dans l’Empire romain, elle était utilisée pour fixer les toges, et chez les Vikings, des fibules en forme de disque servaient à attacher les manteaux. Ce bijou a ainsi voyagé à travers les civilisations, tout en conservant une signification particulière dans le monde berbère.