L’art du tapis berbère

Un art ancestral entre les mains des femmes amazighes au coeur des territoires du Maroc

Tapis berbère de la région d'Ouarzazate

Participez à un stage de découverte de l’art du tissage de tapis.

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Une pratique universelle

Le tapis a de tout temps été un élément essentiel de la vie humaine. La pratique d’utiliser la laine remonte à plusieurs millénaires et semble lier aux régions de Chine et d’Iran. La trace la plus ancienne du tapis noué s’ancre en Sibérie et date du 5ème avant notre ère. L’apparition de cette technique partout ailleurs sur la planète coïncide avec l’usage de confectionner des pièces d’ornement pour les sols ou des couvertures pour les mois les plus froids.

Ce revêtement de sol en laine de mouton allait peu à peu gravir l’histoire pour devenir un objet commun, usuel, mais porteur, raffiné et fier, des singularités culturelles de ses créateurs. C’est ainsi qu’au Maroc, dans les villes impériales comme dans les régions berbères, le tapis est devenu un artisanat d’art qui trouve place aux côtés des grandes traditions des tisserands d’Europe, de Perse, d’Asie et d’Orient.

Au Maroc, cet artisanat du tapis s’est développé selon deux lignées. Si les tapis fabriqués dans les villes, comme à Rabat, Fès ou Médiouna, affirment sans ambages leurs inspirations orientales apparues au sortir de la fastueuse période andalouse quand les artisans musulmans alors présents en Espagne ont du rejoindre le Maroc vers le 15ème siecle, le tapis de tradition berbère semble lui inscrire ses racines dans les temps plus anciens. Des correspondances s’observent en effet entre certains motifs traditionnels et les dessins rupestres qui parsèment la région et datent de plusieurs millénaires.

Artisane berbère sur son métier de tissage à Taznenakhte
Artisane berbère sur son métier de tissage à Taznenakhte

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Tapis en arabe se dit “zarbia”, et en berbère “tazerbyt”, ce qui signifie “parterre fleuri” ou encore “ce qui est tendu au sol et sur lequel on prend appui”. Au Maroc, on emploie également le mot qtifa, de même origine, qui désigne les tapis de haute laine, tissés généralement dans les régions de haute altitude.

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Commandez votre tapis directement auprès d’une femme artisane d’un petit village de tradition berbère près d’Ouarzazate  …

Glaoui type carpet being woven

Le tapis des tribus berbères

L’art berbère du tissage, encore appelé Azetta, c’est l’art rural traditionnel pratiqué par les femmes des peuples nomades ou semi-nomades. C’est donc tout naturellement l’art des tribus berbères. Issue d’un des trois grands ensembles berbères (Masmouda, Zénètes et Sanhadja), chaque tribu a élaboré au cours de son histoire et de ses pérégrinations un style particulier esthétique et technique dans le tissage de ses tapis. Plus qu’un artisanat utilitaire, le tissage est ainsi devenu l’étendard du nom de chacune de ces tribus, dans l’expression de leurs qualités respectives, leur simplicité, leur rusticité et leur sobriété, mais aussi leur vivacité faite de bonne humeur et d’une mélancolie presque naïve.

A l’inverse des tapis de styles orientaux, les tapis berbères n’utilisent pas de modèle et reposent sur la seule inspiration de la femme qui les fabrique, rendant unique chaque pièce de tissage. 

Femmes de Tazenakhte préparant la laine

Le tapis berbère, c’est avant tout celui des femmes berbères, ces femmes vivant dans les campagnes et les montagnes de l’Atlas. De mères en filles, elles se transmettent les techniques du tissage comme les motifs où se mélangent une géométrie abstraite et énigmatique, les symboles de l’écriture Tifinaghe, l’ancestrale écriture du peuple amazighe, ou bien encore des images universelles représentants des scènes de la vie quotidienne (figure animale, dessin d’oiseaux, de chameaux …).

Le tissage des tapis constitue une activité vitale pour ces familles berbères de tradition pastorale qui y trouvent l’une de leurs principales sources de revenus.

Enfin le tapis berbère, c’est l’écho des territoires qui ont accueilli ces tribus au point de devenir au fil des années, et surtout depuis leur sédentarisation, l’écrin de leur identité.

L’art du tapis berbère se différencie donc à partir des différents territoires marocains situés autour de la chaine de l’Atlas :

  • Les tapis du Moyen Atlas de la région de Meknès Rabat : tribu Zemmour, Zaer, Zaiane, Bani Mtir, Ait Sgougou, Beni Mguil …
  • Les tapis Beni Ouarain de la région du Moyen Atlas, grand tapis blanc avec de fins motifs géométriques noirs ou bruns.
  • Les tapis du Haut Atlas et du Djebel Siroua.
  • Les tapis de l’Anti-Atlas.
  • Les tapis du Haouz de Marrakech, un tapis des tribus rurales des Rehamma, H’mar, Oulad Bousebaa, Ahmar, Chiadma.
Participez à un stage de découverte ou d’apprentissage de l’art du tissage de tapis berbère
auprès des femmes du projet Dar Arbalou.
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Le lieu du stage et d’hébergement sont situés au Jardin de Yuda
dans un petit village marocain de tradition amazighe.

Les tapis du Djebel Siroua

Entre Tazenakhte et Taliouine, à 85 km au Sud de Ouarzazate, se trouve l’un des principaux berceaux de production de tapis berbères. C’est le territoire de la confédération des tribus Aït Ouaouzguite qui regroupent les populations amazighes du Haut Atlas et du Jebel Siroua.

Ces tribus sont composées de populations issues de deux des grands groupes racines amazighes, les Masmouda et les Sanhadja. Jadis nomades, ces différentes tribus se sont sédentarisées depuis longtemps tout en préservant leur activité pastorale.

Emblème du Haut Atlas, les tapis des Aït Ouaouzguite ont de tout temps été appréciés pour leur souplesse et leur légèreté en raison de la qualité de leur laine, mais aussi pour l’éclat de leurs couleurs à base de colorants naturels dont les tisseuses maîtrisent encore la technique de fabrication. Ces tapis ont une forme souvent allongée en respect des mesures des pièces d’habitation pour lesquelles ils sont destinés.

Le massif du Djbel Siroua
Le massif du Djbel Siroua

Les tapis des Aït Ouaouzguite

Les tapis Aït Ouaouzguite se distinguent par leur utilisation d’un large répertoire décoratif composé de nombreux symboles et autres motifs divers.

Pendant longtemps ces tapis ont été appelés les tapis Glaoua, du nom de la famille des grands caïds qui régnèrent sur toute la région Sud Est du Maroc depuis la moitié du 19ème siècle et jusqu’à l’indépendance du Maroc. C’est pourquoi on peut observer sur les tapis tissés depuis ces territoires des motifs géométriques déjà utilisés sur les facades des différents casbahs construites et habitées par ces caïds, comme la casbah de Telouet, de Tifoultoute ou de Taourirte.

Les tapis Ouaouzguite se distingue entre eux selon la technique de tissage utilisée :

  • Le Tazerbite qui utilise un tissage avec nœud symétrique sur deux chaînes.
  • Le tapis Glaoua du Haut Atlas qui sont travaillés en combinant trois techniques, le nouage, le tissage plat et la cordelière.
  • Les Zanifi qui sont des tissages plats en tapisserie et cordelière, jadis utilisés pour le transport du grain.
Tapis de la tribu des Aït Tamassine
Tapis de la tribu des Aït Tamassine - 350 x 140 cm
Collection H. Crouzet - Source : Maroc Tapis des tribus - Ed : Edisud
Tapis de la tribu des Aït Makhlef
Tapis de la tribu des Aït Makhlef - 320 x 135 cm
Collection H. Crouzet - Source : Maroc Tapis des tribus - Ed : Edisud
Tapis Hanbel dit Glaoua - Ait Ouazouzguite
Hanbel dit "Hanbel Glaoua" - 380 x 140 cm
Collection H. Crouzet - Source : Maroc Tapis des tribus - Ed : Edisud

Des couleurs naturelles

Autrefois, les femmes berbères teignaient elles-mêmes la laine en utilisant des produits végétaux et minéraux. La tradition stipulait que la tisseuse devant effectuer l’opération de teinture se purifiait préalablement en prenant un bain rituel.

  • Le jaune est obtenu à partir d’une sorte de genêt appelé Achfoud qui pousse à l’état sauvage dans tout le massif du Siroua. Le fleurs jaunes de cet arbrisseau sont cueillis et séchées au soleil pour servir ensuite de colorant. Un mordant est utilisé pour fixer la couleur à la fibre laineuse. Il s’agit de l’alun, appelé localement Azarif, minerai trouvé lui aussi dans le Siroua.
  • Le rouge est obtenu à partir de la garance, appelé Taroubia et qui pousse à l’état sauvage dans la région. Les racines de cette plante sont prélevées et séchées au soleil pour servir de colorant. L’alun est encore utilisé comme mordant.
  • Le bleu est obtenu à partir de l’indigotier, appelé nila, et dont la tige atteint 80 cm de hauteur.
Garance
Isatis tinctoria
Indigotier

L’utilisation d’autres produits complémentaires permettait de mieux préparer les recettes de teinture. C’est ainsi que le henné, cultivé dans la vallée du Drâa, était très souvent utilisé, tout comme l’écorce de pommier pilée, la pulpe de datte séchée, le navet, la figue séchée mais aussi les scories de forge, le noir de fumée ou de la chaux éteinte.

Moutons de la vallée de Tassaoute
Moutons des massifs du Siroua - Crédit : A. Azizi

Une géométrie miroir du monde berbère

Les motifs décoratifs utilisés sont l’expression de la culture de la tribu de l’artisane. Ces motifs sont liés à l’esprit de cohabitation qui a toujours existé dans ces tribus amazighes depuis une histoire lointaine avec des personnes de convictions et de civilisations différentes (musulmans, juifs, berbères, chrétiens).

Les tapis berbères sont ainsi l’exemple le plus frappant d’un esprit de tolérance et de cohabitation.

Le répertoire décoratif des tapis Ouaouzguite présente un large éventail de motifs et de symboles. Aux motifs géométriques classiques viennent ainsi se rajouter des dessins floraux ou animaliers, des figures représentant l’environnement naturel, le soleil, la lune, les étoiles.

Beaucoup de motifs des tapis ont leur origine dans le symbolisme sexuel. Ils représentent de différentes manières la femme, l’homme, la rencontre des deux sexes, le mariage, l’amour, la bien-aimée, puis la grossesse, l’accouchement et la vie.

Les symboles féminins sont les plus nombreux et souvent les plus reconnaissables. Ils sont les mêmes depuis le paléolithique :

  • Le signe X exprime un corps de femme prêt à concevoir.
  • Le chevron est proche du signe X symbolisant les jambes écartées.
  • Le losange représente le ventre de la mère.

Les symboles masculins sont moins visibles car ils encadrent généralement les motifs féminins. Il s’agit généralement de motifs en bandes ou en barres :

  • Échelles.
  • Dossier.
  • Droite.
  • Arête de poisson.

La croix est le signe de l’accouplement, tandis que le diamant à double crochet est l’un des symboles de naissance, les plus courants.

La théière de profil, souvent au milieu du tapis, fait référence à l’hospitalité et à la convivialité propres à la tradition berbère.

Les papillons représentés par deux triangles mais aussi les fleurs et les étoiles représentent la beauté féminine.

Une ligne en zigzag entoure souvent le tapis et représente les rivières, les serpents ou la famille. 

La croix berbère, souvent au milieu du tapis, rappelle l’architecture des casbahs.

Tapis berbères dans une coopérative de Tazenakhte

Le rite du tapis

Le tissage du tapis se nourrit de toute une série de rituels et de pratiques.

Depuis la tonte jusqu’à l’ourdissage, la laine est traitée avec soin et travaillée selon un rituel qui se transmet de génération en génération. Après la tonte, la laine est laissée dans un coin discret de la maison.

La veille de l’opération de teinture, les femmes exposent les différents bains à la lueur des étoiles pour chasser les forces maléfiques. La tisseuse, fumige la laine prête à être teinte et la cache loin des regards, puis elle se purifie comme elle le fait pour ses prières quotidiennes.

Le lendemain à l’aube, la tisseuse retourne vers le bain pour commencer la tenture après avoir prononcé “Bismillah” (Au nom de Dieu).

Une fois le tapis terminé sur son métier, la coupe de la chaîne des fils qui le structure donne lieu à des rituels variés. Souvent seule la tisseuse peut pratiquer cette opération, la porte devant rester fermée jusqu’à la fin.

 

Les femmes de la coopératives Iznaguen de Tazenakhte

Mélopée de la fileuse

Tourne, tourne, mon fuseau,
Mon fuseau de bois fin et poli,
Tourne de plus en plus vite,
Si vite que tu échapperais à mes yeux …
Tourne ! Tu n’auras pas à ralentir
Car mes doigts agiles te nourriront
Au gré de ton tourbillon
Et ne demanderont pas grâce …
Tourne, tourne, mon long fuseau !
Enroule le blanc fil soyeux
La douce laine qui excelle pour la trame …
Tourne, tourne, mon petit fuseau !
Enroule le blanc fil solide,
La rude laine qui réclame la chaîne …
Blanche toison, enroule toi
Pour le bien des gens de la maison !
Ni maintenant ni plus tard sur l’ensouple
Quand ma fille passera trois fois sous l’azeta* …
File, file plus vite entre mes doigts,
Blanche laine qui alourdit mon fuseau !
Pour la maisonnée, y a-t-il bien plus précieux ?
Ô laine blanche, grise ou noire, que ta baraka soit sur nous
Avec le secours de Dieu clément et miséricordieux !

Mririda – N’Aït Attik – Les chants de la Tassaoute (traduits par René Euloge)
* Azeta : métier à tisser en amazighe

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