Au Maroc, le désert qui libère

Est-ce le silence ? Est-ce l’immensité du territoire qui s’impose au voyageur ? Est-ce encore la sensation de vide ressentie face au dénuement du paysage ?

Le désert est comme un aimant mystérieux. Il ne cesse d’attirer à lui des visiteurs, et pourtant il demeure comme insaisissable, impossible à connaitre. Il oblige celles et ceux qui veulent aller à sa rencontre à ne demeurer que dans sa périphérie et ils sont rares à s’engager alors dans la profondeur de sa nature tant tout y est contraire à l’usage qu’on s’est fait de la vie, tout y est en paradoxe avec ce qui compose nos existences.

Chaque jour un peu plus, ici au Maroc, le grand Sahara accueille sur ses franges de nombreux séjours de voyageurs en provenance de tous les pays. La majorité d’entre eux n’y passe qu’un bref instant, le temps d’une ou deux nuits, histoire de gouter à l’idée qu’ils se font du désert. Fouler le sable couleur d’or d’un pas maladroit, gravir le sommet d’une dune pour ensuite en dévaler ses pentes comme le feraient des enfants glissant sur la neige, se jucher sur le dos d’un dromadaire et se laisser chalouper dans sa langoureuse démarche, passer la nuit sous une tente, boire le thé proche d’un feu, s’envouter de la grâce nocturne du ciel étoilé, du soleil levant, et puis repartir vers le monde et retrouver sa course régulière.

Tous repartent du désert avec le sentiment d’avoir touché quelque chose de non ordinaire, quelque chose de contraire à l’ordre habituel des choses. Tous gardent en eux la fragrance d’une paix qu’ils ont frôlée le temps de leur bref séjour dans le désert.

Prendre le temps de la présence

D’autres cependant ont fait le choix d’aller plus en avant dans cette rencontre avec le désert et ses vertus insolites. Grâce à une équipe de professionnels marocains et sous la conduite de Jean-Pierre Datcharry, une guide français qui arpente les dunes du Sahara depuis plus de quarante ans, certains, en groupe ou bien en solitaire, ont décidé de prendre le temps de la présence parmi le sable et sous le vaste ciel.

Jour après jour, ils marchent sur le sommet des dunes, en silence, à l’écoute justement de cette vacuité dans laquelle ils acceptent de pénétrer. A chacune de leur halte, ils savourent les gestes essentiels qui seuls méritent d’être faits en ces lieux. Se reposer de la marche, préparer la tente pour la nuit proche, se restaurer pour reprendre les forces nécessaires à la marche du jour d’après. S’endormir sous la voûte majestueuse d’un ciel pur. Et peu à peu, sentir poindre en soi quelque chose d’inhabituel, comme en écho à cette mélopée sans mots qui se faufile sur les dunes et entoure ceux qui s’y trouvent tels les grains de sable sous leurs pieds, s’entrelace en eux pour finalement s’y imposer, malgré eux : une paix, une harmonie soudaine entre tout de soi, de corps à esprit.

Xavier Roduit fait partie de ces apaisés bienheureux qui ont découvert combien le désert excellait dans l’art majeur de faire émerger la paix en soi.

De nationalité suisse, il était devenu au fil des ans un expert réputé dans l’accompagnement de personnes confrontées à des addictions, telles les drogues, notamment dans le cadre de ses activités au sein de l’organisation thérapeutique Rives du Rhône. Il a voulu confronté ces souffrances à la magie du désert. A partir de 1994, avec l’aide de Jean-Pierre Datcharry et de son agence Désert et Montagne Maroc, il a organisé sur des durées variables, de 10 à 45 jours, des randonnées chamelières parmi les dunes ensablées du Maroc. Il s’est alors rendu compte combien quasi tous les participants rencontraient ces mêmes effluves de paix intérieure propre à soulager leurs tensions et à lentement les ouvrir à une autre réalité d’eux-mêmes.

Pour Xavier, l’alchimie pacificatrice du désert s’explique par la puissance du paradoxe qui s’impose entre la nature même du désert et celle de nos existences. Le silence, le dénuement des formes et la sobriété des gestes sont à l’opposé extrême des brouhahas incessants de nos mondes modernes, de l’accumulation de nos possessions ou de la boulimie de nos consommations. Un monde épuré a pris la place d’un monde boursoufflé de trop-plein de tout et c’est précisément le souffle de la vie qui enfin retrouve un espace pour circuler et que s’épanouit en nous une nouvelle dimension d’être.

« Au fond de nous, on est appelé à respirer la danse du présent, à vivre l’instant du quotidien, à sourire au chamelier qui a préparé le thé. Le désert nous montre que c’est en se dépouillant qu’on découvre la paix. »

Xavier Roduit

Une porte ouverte vers plus de sens

A partir de 2010, Xavier ouvre ses activités à toute personne désireuse de s’engager dans cette recherche de paix. Un passage dans le désert leur donne l’opportunité rare d’un vrai moment de répit au sein de leur existence mouvementée, dans temps de recul pour mieux faire le point sur eux-mêmes, dans un élan sincère de retrait pour alors apprendre comment mieux moduler tous les rouages de leur existence afin de mieux être dans la vie.

Le protocole mis en place est désormais bien rodé. Une fois réunis dans le lieu de base de la randonnée, la maison d’hôtes Dar Daïf, les participants laissent de côté leur téléphone et leur montre et rejoignent la caravane de dromadaires et les guides qui les attendent à l’orée des dunes. Tous s’engagent alors dans une marche jusque vers le lieu de bivouac pour la nuit. La première partie de la marche se fait en silence pour ensuite se poursuivre, après un déjeuner frugal, dans le partage mesuré du ressenti de chacun. Le soir venu, la nuit se prépare dans un même souci de sobriété. On dépose les quelques bout de bois ramassés lors de la marche, on se rafraichit avec un peu d’eau, on se restaure d’un repas traditionnel. Après un dernier moment de partage en groupe, la nuit s’impose pour un nécessaire repos.

« On va toucher le désert de tout notre corps. La nuit nous dormons sur des nattes. Notre matelas c’est le sable du désert et en guise de tente, nous avons la voie lactée. »

Xavier Roduit

Le matin au lever du jour, le groupe se réunit sur le haut d’une dune pour saluer la venue du soleil. Le temps est pris pour un bon petit-déjeuner et s’en suit une discussion de groupe autour d’un sujet d’intérêt commun, toujours dans l’esprit de partager les regards. La marche reprend et ainsi de suite, de jour en jour.

Après plus de 50 expéditions organisées dans le désert, Xavier a toujours questionné les participants au terme de leur randonnée afin de mieux cerner ce que chacun est parvenu à enclencher en lui grâce à cette paix rencontrée au fil de leurs pérégrinations sur le sable. Quatre thématiques reviennent en boucle et illustrent les attentes de nos sociétés humaines occidentales : donner un sens à son existence, mettre à jour ses talents, dessiner son futur, être aimé pour ce que l’on est.

Bien sûr, chacun retourne à sa condition habituelle et souvent la course effrénée des jours reprend sans qu’on puisse vraiment s’en extraire. Mais ces traversées dans le désert auront au moins mis la lumière sur la possibilité d’un changement en chacun d’entre nous. Immanquablement, et malgré nous, s’opère une prise de conscience qu’une autre réalité existe que celle qui nous contient et trop souvent nous oppresse.

Une invitation au dénuement pour oser être

Xavier invite au dénuement pour oser être, connecté à ses racines, celles de sa propre histoire comme celles plus fondamentales de la terre qui nous accueille, connecté au ciel, à son propre ciel, c’est-à-dire au sens de son existence sur terre, et connecté à son cœur, dans un partage naturel avec l’autre.

Cette démarche, telle que pratiquée par Xavier Roduit avec l’appui technique de l’agence Désert et Montagne Maroc, repose finalement sur une inspiration tout simplement humaniste, dénuée de toute doctrine et fondée sur la seule mise en résonnance avec les vertus naturelles du désert et les conditions qu’il procure à ses visiteurs pour vivre un moment de retrait, une mise en parenthèse bienfaisante, et souvent salvatrice, de leur existence.

La source d’une raison d’être singulière et universelle

On ne sort pas indemne d’un passage dans le désert. Quelle que soit la durée du séjour, on ne peut que ressentir en soi une paix méconnue jusqu’alors, comme en reflet de l’harmonie intrinsèque du lieu, de sa simplicité mais aussi de la rigueur qu’il impose à devoir faire le tri entre ce qui est superflu à la vie et ce qui en est essentiel.

Expérimenté en de plus lointaines limites, le désert, au cœur même de son aridité, au centre de cette vacuité qu’il induit auprès de ses visiteurs, peut devenir un lieu où soudain coule de source une raison d’être singulière, car unique, et pourtant universelle, car sans cesse renouvelée et offerte intacte, entière, celle que les fondateurs de nos grandes religions ont découvert lors de leur présence au désert, celle que les ermites errants parmi les sables ont choisi de ne plus quitter, celle qui à tous propose la promesse d’une existence et d’un monde vraiment meilleurs.

Les participants et l’équipe des chameliers de la dernière randonnée organisée par Xavier Roduit avec l’agence Désert et Montagne Maroc du 14 au 22 octobre 2022 entre M’hamid et FoumZguid Au Sud du Désert de Chgaga.

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Prochaine randonnée du 30 décembre au 7 janvier 2023
entre Tafraout n’Aït khbach et Taghbalt
Plus d’informations : xavier.roduit@bluewin.ch ou desertmontagne@gmail.com

A voir : La chaine Youtube de l’agence Désert et Montagne Maroc

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1 commentaire
  1. Notre histoire avec Xavier a démarré il y a 29 ans. Notre première expérience avec un groupe de jeunes en « recherche de sens » était la traversée du Jbel Saghro en 10 jours avec mes amis nomades Aït Atta.
    Au cours de ces expéditions dans le désert, nous avons tissé des liens d’amitié d’exception, Xavier était le directeur des Rives du Rhône, devenu un frère de cœur. Au fil de ces années, avec l’équipe de Désert et Montagne Maroc, des guides et des chameliers qui m’épaule, nous avons avec ces jeunes, traversé à pied par étapes de plusieurs mois tout le désert du Maroc. Reliant Nador depuis la Méditerranée jusqu’à la frontière Sud du Maroc avec la Mauritanie 4200 km. Une fois nous avons emmené l’équipe traverser une partie de la Mauritanie.
    Des expéditions chamelières très engagées à l’époque, possible grâce à cette complicité entre notre équipe Marocaine expérimentée et l’équipe d’encadrement très engagée, montée par Xavier pour accompagner ces jeunes. Certaines étapes il y avait jusqu’à 45 « voyageurs », plus une trentaine de chameliers et guides, un véritable « pèlerinage du désert », de ce désert qui libère, empruntant les chemins des caravanes d’autrefois.

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